Mon compte Je m'abonne
Fiches pratiques

Visite médicale du travail oubliée par l'employeur : quelles sanctions ?

Publié par Julien van der Feer le | Mis à jour le
Visite médicale du travail oubliée par l'employeur : quelles sanctions ?

La visite médicale du travail figure parmi les obligations incombant à l'employeur. En cas d'oubli, ce dernier risque des sanctions sévères. Tour d'horizon.

C'est quoi la visite médicale du travail ?

La visite médicale du travail désigne un examen dont l'objectif est de contrôler les aptitudes mentales et physiques du salarié et pour s'assurer qu'il puisse exercer ses activités professionnelles. À la fin de chaque visite médicale, le médecin du travail remet une fiche d'aptitude à l'employeur ainsi qu'au salarié.

Le but de ces visites médicales obligatoires est précisé dans les textes de l'article R 4624-11. Ainsi, l'examen médical d'embauche a plusieurs objectifs :

  • De s'assurer que le salarié est médicalement apte au poste de travail auquel l'employeur envisage de l'affecter ;
  • De proposer éventuellement les adaptations du poste ou l'affectation à d'autres postes ;
  • De rechercher si le salarié n'est pas atteint d'une affection dangereuse pour les autres travailleurs.

La visite médicale du travail peut avoir plusieurs déclinaisons selon les cas :

La visite d'information et de prévention ou VIP

En général, cette visite médicale a lieu trois mois après l'embauche du salarié, sauf s'il en a déjà effectué une au cours des cinq années précédentes. La VIP est réalisée par le médecin du travail ou sous son autorité, par le collaborateur médecin. À la fin de celle-ci, le médecin déclare si le salarié est apte, partiellement apte ou inapte à la pratique de son travail. De plus, le médecin peut proposer à l'employeur une mutation ou une transformation de poste. Si l'employeur refuse il doit se justifier.

Dans cette vidéo, un médecin du travail explique le déroulement d'une visite médicale :


Examen médical de mi-carrière

Introduis en 2022, cette visite médicale a lieu lorsque le salarié a 45 ans, sauf si un accord de branche précise une autre période. Elle a pour objectif de faire un état des lieux de sa santé à mi-parcours de sa carrière professionnelle. Suite à cet entretien, le médecin peut recommander à l'employeur des aménagements de poste et d'horaires de travail.

L'examen médical d'aptitude

L'apprenti qui est amené à accomplir des travaux réglementés dans les 2 mois suivant son embauche doit subir un examen médical d'aptitude.

Le suivi médical renforcé des postes à risques

Ce suivi médical concerne les salariés qui sont affectés à des postes comportant des risques spécifiques pour leur santé. Il peut s'agir de travailleurs exposés au plomb, aux rayonnements ionisants ou encore à l'amiante. Selon l'article R.4624-23 « tout travailleur affecté à un poste présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité ou pour celles de ses collègues ou des tiers évoluant dans un environnement risqué bénéficie d'un suivi individuel renforcé de son état de santé ».

La visite médicale personnalisée

Ce type de visite médicale se déroule tous les 2 ou 4 ans. Il s'adresse à une catégorie d'employés dont l'âge, l'état de santé, les risques professionnels requièrent un suivi spécifique. Les salariés concernés sont les femmes enceintes, les salariés en situation de handicap, les travailleurs de nuit ou les employés déclarant être titulaires d'une pension d'invalidité.

La visite médicale de reprise ou de pré-reprise

Les visites médicales de reprise et de pré-reprise doivent être effectuées après certains arrêts maladie. Cette visite est effectuée après un congé de maternité, une absence pour cause de maladie professionnelle, une absence d'au moins 30 jours pour cause d'accident du travail, une absence d'au moins 60 jours pour cause de maladie ou d'accident non professionnel et en cas d'absences répétées pour raisons de santé. La visite doit avoir lieu dans les huit jours suivant la reprise du travail. Aussi, l'employeur doit informer le médecin du travail en cas d'arrêt de travail inférieur à 30 jours lié à un accident du travail.

La visite médicale organisée

Il s'agit des visites médicales qui sont organisées à tout moment sur la demande des médecins du travail, des employeurs ou des salariés.

La visite médicale complémentaire

Le médecin de travail est en mesure de prescrire des examens complémentaires afin de dépister des maladies. Ces dernières peuvent être provoquées par l'activité professionnelle.

La visite médicale du travail est une obligation qui incombe à tous les chefs d'entreprise. En cas de manquement de l'employeur, les conséquences peuvent être lourdes.

Qui est concerné par la visite médicale ?

Trois types d'établissements sont concernés par l'obligation d'organiser un service de prévention et de santé au travail (ou d'y adhérer le cas échéant) :

  • Les entreprises privées
  • Les établissements publics à caractère administratif (EPA) qui emploient du personnel de droit privé
  • Les établissements publics industriels et commerciaux (EPIC)

Les salariés concernés par l'obligation de suivi médical sont ceux étant soit en CDI, soit en CDD, soit en intérim ou soit en contrat d'apprentissage. Les salariés doivent passer leur visite médicale dans les 2 mois suivant leur embauche, sauf s'ils en ont déjà effectué une au cours des cinq dernières années. Par ailleurs, les visites médicales doivent être réalisées tous les trois ans pour les travailleurs handicapés, les travailleurs titulaires d'une pension d'invalidité et les travailleurs de nuit.

Les visites médicales doivent se dérouler sur les heures de travail. Si les examens ne peuvent avoir lieu pendant les heures de travail du salarié, ils doivent être rémunérés comme du temps de travail effectif.

Que peut proposer la médecine de travail suite aux visites médicales des salariés ?

Suivant les cas, le médecin du travail peut imposer des mesures individuelles pour aménager, adapter ou transformer le poste de travail du salarié concerné. Il peut également proposer des mesures d'aménagement du temps de travail.

Si l'état de santé du travailleur justifie un changement de poste, le médecin du travail peut le déclarer inapte pour son poste de travail. Un avis d'inaptitude sera remis à l'employeur et au salarié. Celui-ci comporte par conséquent des indications pour reclasser le travailleur.

Visite médicale du travail oubliée : quelles sanctions pour l'employeur ?

La visite médicale non effectuée pour cause d'oubli de la part de l'employeur peut avoir de lourdes conséquences.

Le paiement d'une amende de 5e classe

D'après l'article R.4745-1 du Code du travail, l'employeur est passible d'une amende de cinquième classe quand il ne respecte pas les dispositions relatives à l'organisation et aux missions des services de santé, notamment en cas d'oubli ou d'absence de visite médicale. Le montant de cette amende est de 1 500 euros.

La condamnation à des dommages et intérêts pour non-respect de la réglementation relative aux visites médicales

Le fait de ne pas organiser une visite médicale de travail provoque nécessairement un préjudice à l'employé. Par conséquent, ce dernier peut prétendre à des dommages et intérêts pour non-respect de la réglementation relative aux visites médicales. Il est tout à fait possible d'engager la responsabilité de l'employeur dans le cas où le salarié invoque que la maladie dont il souffre aurait pu être découverte s'il avait fait une visite médicale.

À noter qu'en cas de récidive dans un délai de 3 ans, l'employeur encourt une peine d'emprisonnement de 4 mois. L'article L.4745-1 du Code du travail prévoit même une amende de 3 750 euros.

Le paiement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

L'oubli de la visite médicale de la part du chef d'entreprise est susceptible lui porter préjudice avec les mêmes effets qu'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Ce manquement de l'employeur peut lui coûter cher, car il sera obligé de payer des indemnités diverses, dont :

  • L'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
  • L'indemnité compensatrice de préavis et de congés payés ;
  • L'indemnité de licenciement.

Visite médicale oubliée pour le salarié : quelles sanctions pour le salarié ?

S'il s'agit d'un simple oubli, un simple rappel au salarié suffit. Si le médecin du travail n'a pas la possibilité de rencontrer un salarié, il n'aura d'autre choix toutefois que d'en informer l'employeur

Une cause réelle et sérieuse de licenciement

L'absence du salarié peut avoir de lourdes conséquences et peut-être une cause réelle de licenciement. Deux décisions de la Cour de cassation dans le passé vont dans ce sens :

  • la chambre sociale, le 17 octobre 2000, n° de pourvoi 97-45286, a confirmé le motif de licenciement pour faute grave à l'encontre d'un salarié qui, après avoir été déclaré temporairement inapte en raison d'une maladie, ne s'était pas présenté à la visite médicale prévue à la fin de la suspension.
  • la chambre sociale, le 29 mai 1986, n° de pourvoi 83-45409, a confirmé le licenciement d'un salarié ayant refusé de se présenter à la visite régulière de médecine du travail (attendu que la Cour d'appel a pu estimer, en raison du caractère impératif des dispositions légales et réglementaires régissant la médecine préventive du travail, que le refus opposé par M. E... constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement ; que, par ce seul motif, elle a légalement justifié sa décision).

Par ailleurs, à partir du 1er janvier 2024, la mutualisation du suivi de l'état de santé des travailleurs occupant des emplois identiques auprès d'employeurs différents entre en vigueur, prévient le ministère du Travail. La répartition du coût des cotisations annuelles d'adhésion au service de prévention et de santé au travail entre les employeurs a été définie par le Décret n° 2023-547 du 30 juin 2023.