Comment mettre en place le droit à la déconnexion ?
À l'heure où l'omniprésence digitale affine la frontière pro/privée, le droit à la déconnexion s'inscrit dans les démarches obligatoires de l'entreprise.
Télétravail et droit à la déconnexion : le contexte actuel
Généralisé par la crise sanitaire, l'exercice du télétravail est passé de mesure temporaire dans la gestion de la pandémie à pratique commune dans les entreprises. De par ses avantages, ce système s'est imposé comme une alternative viable au travail en présentiel. Les moyens technologiques et numériques dont disposent actuellement les entreprises facilitent par ailleurs l'intégration du télétravail comme mode de travail durable.
Cependant, la mise en place sur le long terme du travail à la maison requiert une définition précise du droit des salariés à la déconnexion. À défaut, le télétravail risque de créer et renforcer l'illusion de devoir rester constamment joignable, même en dehors du temps de travail. Afin de préserver l'intégrité physique et psychologique des télétravailleurs, le cadre légal du droit à la déconnexion a été renforcé dans le code du travail.
Le droit à la déconnexion, c'est quoi ?
Concrètement, le droit à la déconnexion est un dispositif légal visant à redessiner les frontières entre la vie professionnelle et la vie privée des salariés que l'ère du numérique tend à effacer. Certes, la mobilité des nouvelles solutions digitales facilite l'exercice du télétravail. Néanmoins, cet accès instantané aux outils numériques liés au travail s'accompagne d'un risque accru de burn-out et de surconnexion.
Le droit à la déconnexion stipule que les salariés ne sont pas tenus de rester constamment joignables par l'entreprise, notamment hors de leur période de travail. Ils ont le droit de se déconnecter de leur poste une fois leur temps de travail achevé, que ce soit le weekend, lors des congés payés ou des jours de RTT.
Dans le contexte actuel, la question du droit à la déconnexion est devenue une préoccupation primordiale pour les entreprises. Dans son guide sur le télétravail, rendu public en mai 2020, le gouvernement encourage notamment les employeurs à définir avec précision les plages horaires de déconnexion de leurs salariés.
En quoi le droit à la déconnexion contribue-t-il au bien-être du salarié ?
Le droit à la déconnexion s'inscrit dans le respect de l'humain et de la préservation du bien-être du salarié au travail. Il vise à prévenir les excès de temps de travail hebdomadaire défini pour chacun. Avec le télétravail, les risques de surconnexion sont renforcés. Dans cette optique, le droit à la déconnexion constitue une barrière de protection légale pour les salariés. Il sert également à optimiser le confort de travail et le bien-être des travailleurs, réduisant au passage les risques de burn-out.
Le droit à la déconnexion, comment ça marche pour les employés ?
Le droit d'être injoignable en dehors des temps de travail permet aux salariés de :
- Ne pas répondre aux mails et appels de l'employeur sur leur téléphone privé hors temps de travail ;
- Ne pas consulter les mails en dehors des horaires de travail ;
- Ne pas ouvrir les outils numériques liés au travail pendant ses temps de repos, les congés payés, les jours de RTT, les soirées et weekends.
Que dit le Cadre Légal sur la mise en place du droit à la déconnexion ?
L'inscription du droit à la déconnexion dans le cadre légal intervient dans l'ajustement du droit de travail face à la transformation digitale. Ce dernier est notamment stipulé dans l'article 55, chapitre II, de la loi El Khomri, ou loi Travail, votée en 2016. L'article L. 2242-17 du Code du travail mentionne également l'obligation des entreprises à mettre en place le droit à la déconnexion pour leurs salariés.
Cependant, aucun des deux articles de loi ne définit dans l'exactitude les modalités d'exercice du droit à la déconnexion. Son application et la définition de ses modalités incombent ainsi aux entreprises concernées. Pour ce faire, les employeurs doivent aborder le sujet du droit à la déconnexion lors de la négociation annuelle obligatoire. Cette discussion, tenue généralement tous les ans, implique les représentants syndicaux. À défaut, l'élaboration d'une charte d'entreprise est requise pour définir les modalités du droit à la déconnexion. Celle-ci doit également rappeler les bonnes pratiques à adopter pour un usage modéré du numérique.
Des conventions collectives définies par une fédération de professions peuvent également stipuler les modalités du droit à la déconnexion pour tous les salariés liés à la convention. C'est notamment le cas de la fédération Syntec qui a établi, en 2014, un accord de branche concernant le droit à la déconnexion.
Le droit à la déconnexion, une obligation reconnue par la Cour de cassation
Bien qu'il soit reconnu comme une obligation légale par le Code du travail, le non-respect du droit à la déconnexion en soi n'est passible d'aucune sanction. Cependant, d'autres motifs de pénalité, concernant notamment le non-respect du temps de repos des salariés et conduisant à une violation de son droit à la déconnexion, peuvent être pris en compte dans un cas de jurisprudence. La Cour de cassation, qui avait déjà reconnu ce droit en 2014, est donc à même de sanctionner des entreprises qui contraignent indûment leurs salariés à la disponibilité permanente.